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Comprendre l’anxiété et la dépression chez le personnel de la sécurité publique et soutenir le rétablissement

Le personnel de la sécurité publique présente des taux élevés d’anxiété et de dépression en raison des traumatismes répétés et du stress professionnel, ce qui rend la sensibilisation à la santé mentale et le soutien essentiels à leur bien-être et à la pérennité de leur carrière.

L’anxiété et la dépression font partie des problèmes de santé mentale les plus courants chez le personnel de sécurité publique (« les PSP »), notamment les policiers, les pompiers, les ambulanciers, les agents correctionnels et les répartiteurs d’urgence. En Ontario, les PSP sont régulièrement exposés à des incidents critiques, à des menaces imprévisibles, au stress professionnel et à des exigences systémiques. Ces facteurs augmentent la vulnérabilité à la détresse psychologique.   

Bien que ces professions soient fondées sur la résilience et le service, elles ne sont pas à l’abri des problèmes de santé mentale. En fait, des données canadiennes récentes montrent que les PSP sont jusqu’à quatre fois plus susceptibles que la population générale de présenter un dépistage positif pour un ou plusieurs troubles de santé mentale, notamment le trouble dépressif majeur et le trouble d’anxiété généralisée (Carleton et al., 2018). 

Il est essentiel de comprendre comment l’anxiété et la dépression se manifestent chez les PSP et comment les gérer efficacement, non seulement pour le bien-être individuel, mais aussi pour le bien-être familial, la sécurité au travail et la viabilité de la carrière à long terme. 

Qu’est-ce que l’anxiété et la dépression? 

L’anxiété est une réponse émotionnelle et physiologique à la perception d’une menace ou d’un danger, et elle fait partie de l’expérience humaine. Toutefois, les troubles anxieux se caractérisent par une anxiété persistante, grave ou significative qui provoque une détresse chez l’individu et interfère avec sa capacité à fonctionner au travail, en société ou à la maison. Il existe différents types de troubles anxieux, les plus courants étant le trouble d’anxiété généralisée, le trouble anxieux social et le trouble panique. Les symptômes d’anxiété peuvent également caractériser d’autres troubles mentaux, notamment le syndrome de stress post-traumatique (SSPT).  

La dépression est une réaction émotionnelle et physiologique caractérisée par une humeur maussade et un manque d’intérêt ou de plaisir pour des activités qui étaient auparavant agréables (anhédonie). Il existe différents types de troubles dépressifs, et les symptômes ou épisodes dépressifs peuvent être indicateurs d’autres problèmes de santé mentale, notamment le SSPT et le trouble bipolaire. Le type de trouble dépressif le plus courant est le trouble dépressif majeur (TDM), qui se caractérise par une humeur maussade et une anhédonie, ainsi que par une constellation d’autres symptômes tels que des troubles cognitifs (difficultés à se concentrer ou à prendre des décisions), des troubles du sommeil (dormir trop ou pas assez), des changements d’appétit ou d’habitudes alimentaires, de la fatigue et un manque d’énergie, de l’agitation ou de la léthargie, des sentiments d’inutilité ou des niveaux inappropriés de culpabilité, et il peut y avoir des pensées de mort, des tentatives de suicide et le suicide.   

Enfin, la dépression et les troubles anxieux coexistent souvent, ce qui signifie qu’une personne peut présenter des symptômes de l’un ou des deux problèmes de santé mentale (Kalin, 2020). 

Si vous vous demandez si vous ou un de vos proches souffrez de dépression ou d’anxiété, demandez à votre médecin de famille de vous orienter vers un psychologue clinicien ou un psychiatre.  

Conseil clé : Des mesures particulières telles que le GAD-7 ou le PHQ-9 permettent de dépister un trouble d’anxiété généralisée ou un trouble dépressif majeur. Bien qu’il ne s’agisse pas de diagnostics, ces mesures peuvent vous donner une idée des symptômes de ces troubles.  

Comment reconnaître l’anxiété et la dépression chez les PSP? 

L’anxiété chez les PSP peut se manifester par une inquiétude chronique, une hypervigilance, une difficulté à se détendre, une tension physique, des problèmes gastro-intestinaux et des symptômes de panique. Ces symptômes s’intensifient souvent après une exposition prolongée à des événements traumatisants, à l’incertitude ou à un stress professionnel cumulatif. 

La dépression peut se manifester par une baisse d’humeur persistante, un engourdissement émotionnel, une irritabilité, des troubles du sommeil, une perte d’intérêt pour les activités (y compris le travail), un sentiment de désespoir, une fatigue et des pensées suicidaires. Dans le cas des PSP, la dépression est souvent masquée par une activité excessive ou un détachement émotionnel. 

Pourquoi les PSP sont-ils plus à risque? 

Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles les PSP sont plus susceptibles de présenter un dépistage positif pour un ou plusieurs problèmes de santé mentale (Carleton et al., 2018). Parmi les facteurs qui rendent les PSP plus vulnérables, on peut citer les suivants : 

  • Exposition régulière à des traumatismes (par exemple, décès, agressions, événements impliquant un grand nombre de victimes) 

  • Travail de quart et rythmes circadiens perturbés 

  • Stress organisationnel (par exemple, pénurie de ressources, changements de politique, manque de soutien) 

  • Stigmatisation et culture du « dur à cuire » qui décourage la recherche d’aide 

  • Dilemmes éthiques ou préjudice moral (lorsque les actes accomplis dans le cadre du travail violent les valeurs personnelles) 

Stratégies de base pour gérer l’anxiété et la dépression 

1. Normaliser et nommer l’expérience 

Les problèmes de santé mentale ne sont pas une faiblesse. Il s’agit de réactions humaines à un stress prolongé et intense. Comme l’a montré le Dr Dan Siegel (2014) dans ses recherches, le simple fait d’identifier et de nommer ses émotions peut réduire la réaction au stress (CITE). Nier, ignorer, minimiser ou même critique sa souffrance ne fait qu’amplifier l’expérience et accroître la honte et les mécanismes d’adaptation néfastes (c’est-à-dire la consommation de substances, le retrait des autres, la colère et les comportements agressifs).  
L’éducation et la psychoéducation peuvent contribuer à réduire la honte et la stigmatisation. 
Il s’agit d’encourager un langage qui valide plutôt que de pathologiser les autres et soi-même (par exemple, « tu t’adapte à une charge de travail très stressante » plutôt que « tu es en train de craquer » ou « je traverse une période difficile en ce moment, n’importe aurait de la difficulté » plutôt que « qu’est-ce qui ne va pas chez moi, je devrais être capable de gérer cela »). 

2. Créer une boîte à outils de résilience 

Disposer d’une boîte à outils contenant des compétences et des stratégies pratiques et fondées sur des données probantes peut aider à gérer les symptômes en temps réel. Envisagez de créer une liste, une boîte, une note sur votre téléphone ou tout autre type de boîte à outils contenant des compétences clés, telles que : 

  • La respiration carrée (utilisée par les équipes tactiques) : Inspirez pendant 4 secondes, retenez votre respiration pendant 4 secondes, expirez pendant 4 secondes et attendez 4 secondes avant de recommencer. 

  • Techniques d’ancrage dans le moment présent : Utilisez la méthode 5-4-3-2-1 pour réduire l’état de panique ou les rappels d’images (flashbacks). Pour ce faire, nommez 5 choses que vous pouvez voir, 4 choses que vous pouvez toucher, 3 choses que vous pouvez entendre, 2 choses que vous pouvez sentir et 1 chose que vous pouvez goûter.  

  • Restructuration cognitive : Remettez en question les schémas de pensée inutiles en utilisant des outils cognitivo-comportementaux tels que l’enregistrement des pensées.  

  • Activité physique : Le mouvement libère les tensions, améliore le sommeil et stimule l’humeur. Introduisez des activités basées sur le mouvement; même 10 à 15 minutes de marche peuvent aider à réguler le système nerveux. Pensez à la marche, au yoga, aux étirements, à la pratique d’un sport ou à la gymnastique.  

3. Se connecter et communiquer 

La connexion est l’antidote de l’isolement. Que ce soit par l’intermédiaire de pairs, de thérapeutes, d’amis, de guides spirituels ou de membres de la famille en qui l’on a confiance, le fait de parler aide. Tendez la main aux autres lorsque vous ressentez des symptômes d’anxiété ou de dépression. 
Recherchez des thérapeutes compétents sur le plan culturel (par exemple, ceux qui sont formés aux soins tenant compte des traumatismes et qui connaissent la culture des PSP). 
Les programmes de soutien par les pairs, lorsque ces derniers sont correctement formés et supervisés, peuvent être très efficaces. Il peut être difficile de tendre la main lorsque l’on est en difficulté; planifiez les moments difficiles en organisant des rencontres ou des bilans réguliers, ou établissez un plan avec vos proches pour qu’ils sachent comment communiquer au mieux avec vous lorsque vous êtes en difficulté.  

Conseils pour les familles et les proches 

Il peut être difficile de soutenir un proche qui souffre de dépression ou d’anxiété. En tant que membre de la famille, il peut être utile de prendre les mesures suivantes :  

  • Apprendre à reconnaître les signes et les symptômes, comme les sautes d’humeur, l’irritabilité, l’isolement et les changements dans le sommeil. 

  • Comprendre que le retrait émotionnel peut être un signe de stress et non de rejet. 

  • Offrir un soutien sans porter de jugement et encourager le recours à des ressources professionnelles. 

  • Ne pas oublier votre propre bien-être. Les traumatismes secondaires et l’épuisement des aidants sont réels, et prendre soin de vous peut vous aider à mieux soutenir les autres.  

Quand demander l’aide d’un professionnel 

Il est important de savoir quand vous avez besoin d’un soutien professionnel. Vous pouvez avoir besoin d’un soutien si : 

  • les symptômes persistent pendant plus de deux semaines et interfèrent avec votre fonctionnement à la maison, dans la communauté (ou socialement) ou au travail;  

  • vous avez des idées d’automutilation ou de suicide;

  • vous consommez plus fréquemment des substances pour faire face à la situation;

  • vous vous sentez émotionnellement insensible ou déconnecté de vous-même, des gens, de votre environnement ou de votre travail. 

Un accès hâtif aux soins permet d’éviter l’aggravation de la situation et favorise le rétablissement. Des services confidentiels et culturellement compétents sont de plus en plus accessibles en Ontario. Vous trouverez ci-dessous une liste de ressources.  

Ressources en Ontario 

  • Badge of Life Canada : Soutien par les pairs, ressources et défense des intérêts des PSP atteints du SSPT et d’autres blessures de stress opérationnel. 
      Site Web : www.badgeoflifecanada.org 

  • Outils d’autoévaluation de l’ICRTSP : Outils de dépistage anonymes adaptés à la santé mentale des PSP. 
      Site web : www.cipsrt-icrtsp.ca 

  • Wounded Warriors Canada : Programmes tenant compte des traumatismes pour les PSP et leurs familles. 
      Site Web : www.woundedwarriors.ca 

  • Recherche de thérapeutes - Psychology Today Ontario : Utilisez des filtres pour trouver un thérapeute pour les PSP compétent sur le plan culturel dans votre région. 
    Site Web : www.psychologytoday.com/ca/therapists/ontario 

Références 

Angehrn, A., Krakauer, R. L. et Carleton, R. N. (2023). « The impact of intolerance of uncertainty and anxiety sensitivity on mental health among public safety personnel: When uncertainty is unavoidable » [L’impact de l’intolérance à l’incertitude et de la sensibilité à l’anxiété sur la santé mentale du personnel de la sécurité publique : Quand l’incertitude est inévitable]. Journal of Anxiety Disorders, 90, 102618. 
https://doi.org/10.1016/j.janxdis.2023.102618 

Carleton, R. N., Afifi, T. O., Turner, S., Taillieu, T., LeBouthillier, D. M., Duranceau, S.  et Asmundson, G. J. G. (2018). « Mental disorder symptoms among public safety personnel in Canada » [Symptômes de troubles mentaux chez le personnel de la sécurité publique au Canada]. Revue canadienne de psychiatrie, 63(1), 54-64. 

Institut canadien de recherche et de traitement pour la sécurité publique (ICRSP) (s.d.). Glossaire : Une compréhension commune des termes utilisés pour décrire les traumatismes psychologiques. Extrait de www.cipsrt-icrtsp.ca 

Dalai Lama Centre for Peace and Education. (8 décembre 2014). Dan Siegel : Name it To Tame it [Le nommer pour l’apprivoiser] [Vidéo]. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=ZcDLzppD4Jc 

Kalin, N. H. (2020). « The Critical Relationship Between Anxiety and Depression » [La relation critique entre l’anxiété et la dépression]. American Journal of Psychiatry, 177(5), 365-367. https://doi.org/10.1176/appi.ajp.2020.20030305 

Regehr, C. et LeBlanc, V. R. (2017). « PTSD, Acute Stress, Performance and Decision-Making in Emergency Service Workers » [SSPT, stress aigu, performance et prise de décision chez les travailleurs des services d’urgence]. Journal of the American Academy of Psychiatry and the Law, 45(2), 184-192.